À 17 ans, sur les bancs du Lycée Sainte-Marie de Lyon, Quentin, Charles et Xavier ont eu un véritable coup de foudre amical.
Alors que les bons pères maristes s’efforçaient d’aiguiser leur regard sur le monde, c’est une paire de lunettes qui allait faire leur succès.
Leur diplôme d’école de commerce en poche, les voici au pied du mur de la vie professionnelle. «Ce qui nous intéressait, c’était d’être heureux au quotidien » se souvient Quentin Couturier : « Nous voulions garder une certaine forme de liberté, nous avions un même goût de l’entreprenariat et notre priorité était de rester tous les trois. » S’ensuivent de longues séances de cogitation à la recherche de LA bonne idée. Ils ont 24 ans et observent leur environnement. Leurs mères en particulier. « Où sont mes lunettes ? » est une litanie qui fait mouche. Il faudrait installer des loupes partout où les presbytes, impuissants à déchiffrer les petits caractères, en auraient besoin : guichets de banque, boutiques, administrations…
En 2010, ils lancent See Up, une drôle de pair de lunettes à manche, fichée sur un socle comme un stylo, posée sur le comptoir. Un réseau de banques leur fait confiance, mais ce marché B to B est étroit. Après ce premier succès d’estime, leur vision s’éclaircit. Chacun devrait avoir plusieurs paires de lunettes, partout, en toutes circonstances. Les loupes vendues en pharmacie sont pratiques, mais peu valorisantes. Pas assez sexy pour la génération émergente des Quincados, presbyte, certes, mais intransigeante sur le look. Ainsi naît See Concept, en 2012. Des montures colorées, simples et surtout pas ringardes. Leur ambition est de créer un produit universel, vendu dans le monde entier. Leurs modèles : la montre Swatch, le briquet Bic.
« Izipizi, pour « easy-peasy », signifie simple comme bonjour en anglais ».
Dès le départ, la jeune start-up cherche à se démarquer, en explorant des circuits de distribution inédits. Plus qu’un produit technique, le trio vend un life-style heureux et « trendy ». Leur cible : les concept stores précurseurs de tendance. Ils parient sur MAISON&OBJET. Bonne pioche, ils décrochent Colette et Merci à Paris, Le MOMA et Barneys à New-York, Selfriges à Londres, Isetan à Tokyo. Leurs paires « toucher peau de pêche » et souples rentrent dans la panoplie des accessoires désirables au même titre que les derniers sneakers ou l’enceinte design. En 2014, la gamme s’étoffe de solaires, en 2015, naissent les « screen » qui filtrent la lumière bleue des écrans. Enfin la ligne junior, les masques de ski… à partir de 25 euros pour les enfants, 30 euros pour les grands. Rebaptisée IZIPIZI en 2017, la marque se veut « facile, cool, wahoo ». « Izipizi, pour « easy-peasy » signifie simple comme bonjour en anglais », traduit Quentin.
À 32 ans, à force de travail acharné et d’innovation constante, les trois amis sont en train de conquérir le monde. À la tête de 75 salariés, le trio garde en tête l’amitié et la joie de vivre qui les ont façonnés sur les bancs de l’école. Quentin se charge du retail, du e-commerce et de la communication. Charles gère l’international et la finance, Xavier le développement produit et la production. Vendues dans 85 pays, portées par des premières dames ou des rock stars, leurs montures fun et démocratiques pourraient adopter d’autres slogans célèbres comme « United Colors » (of Benetton) ou « Venez comme vous êtes » (chez McDonald’s). Pour rien au monde ils ne manqueraient une édition de MAISON&OBJET, pilier de leur stratégie : « Nous exposons dans 70 salons chaque année, mais c’est ici, le départ historique, que toute l’équipe se retrouve ».
Par Caroline Tossan