Depuis 100 ans exactement et le manifeste du surréalisme, ce mouvement artistique inspire, provoque, électrise la création sous toutes ses formes. Dès janvier, avec le thème Sur/Reality, Maison&Objet saisira ses vibrations toujours fertiles et leur résonance chez les consommateurs.
« Paradis imaginaires, invitation à la rêverie, plongée dans l’inconscient, humour, extravagance, extraordinaire, étonnement, audace, cadavre exquis, nouveau regard… et espace de liberté ! »
Citation d'Elizabeth Leriche lorsque, par une association d’idées que ne dénigreraient pas ses disciples, elle évoque les univers que lui suggère le surréalisme.
C’est sur cette liberté que l’agence Peclers pointe son doigt expert tandis que le Centre Pompidou* consacre l’importance historique de ce mouvement artistique avec une exposition foisonnante et labyrinthique. « Nous avons voulu travailler le surréalisme de manière beaucoup plus contemporaine (…) Cette capacité à remettre du merveilleux, à bousculer l’ordre établi, est extrêmement riche et fertile pour imaginer de nouvelles formes de réalités », soulignent Charlotte Cazals, Trend Forecaster de l’agence qui cite pour exemple le film Poor Things de Yorgos Lanthinos, Lion d’Or à la Mostra de Venise en 2023. « Ses codes esthétiques forts et fantastiques reposent sur une réalité distordue, à la fois étrangement familière et délicieusement dérangeante. Cette distorsion est un ressort créatif durable qui fait naître des réalités moins cadrées par les codes de nos sociétés », détaille-t-elle. Un état d’esprit qui nourrit aujourd’hui une création contemporaine qui se permet d’être intrigante, extravagante, poétique. Elizabeth Leriche et son bureau de tendances entendent bien explorer, « face à la réalité anxiogène, au besoin de s’échapper », les imaginaires aussi débridés que nécessaires qu’elle engendre. « Cet esprit surréaliste dans la création d’aujourd’hui, je le vois toujours présent dans cette esthétique du collage, c’est à dire ce principe d’accumulations, de superpositions, de télescopages, constate pour sa part François Delclaux. Créateurs, décorateurs, architectes d’intérieurs, s’emparent ainsi d’une multitude de références historiques et artistiques pour les acculturer entre elles, les mixer, les fusionner afin de créer des images fortes, uniques et au fort pouvoir de séduction ».
Pour les repérer, on pourra bien sûr s’appuyer en janvier sur les sélections toujours riches et inspirantes qu’avec Elizabeth Leriche, ils livreront respectivement sur les espaces What’s New? In Retail et What’s New? In Decor. On pourra aussi se laisser prendre par l’univers déconcertant et coloré de Julien Sebban. Après une prise de pouvoir remarquée au somptueux Hôtel de la Marine par Uchronia lors de la dernière Paris Design Week, Maison&Objet confie au fondateur de ce collectif créatif bouillonnant les clés du prochain What’s New? In Hospitality. Les jeux d’échelles et de contrastes entre le lit à baldaquin créé pour l'événement parisien en septembre et l’architecture du bâtiment de place de la Concorde jouaient déjà avec nos perceptions de manière très… surréaliste.
On peut aussi garder un œil ouvert pendant son parcours sur tout ce qui sort du cadre, dérange, intrigue, perturbe les sensations et se laisser séduire, par exemple, par les miroirs dégoulinants de Polspotten qui comme souvent bouscule les conventions. « Notre collection d'objets est composée de pièces audacieuses et non conventionnelles. Elles sont imprégnées d'un sens de l'émerveillement et du défi qui transforme des objets ordinaires en sujets de conversation, des pièces qui existent pour provoquer la réflexion et l'imagination. Elles incarnent l'esprit du surréalisme, où rien (et tout) n'est tout à fait ce qu'il semble être », abonde Alex Tutuianu. L’étrangeté des mains en céramique à la facture artisanale qui accueille le dernier né des casques audio Sonos confirme audacieusement le propos du directeur de la marque néerlandaise. Les lampes dont le pied comme le chapeau sont constitués du même effet d’abat-jour plissé de Doing Goods brouillent aussi joliment les codes tandis que chez Bitossi, on n’est pas loin d’imaginer avec leurs accessoires, assiettes et plats, que c’est Alice elle-même qui s’apprête à passer à table dans ce pays des merveilles italien. Les sièges aux formes exagérément rondes de Yoomoota ou chaises délicieusement velues de Vintola semblent le résultat d’hybridations joyeuses. Les jeux de « collages » évoqués par François Delclaux s’expriment en trois dimensions dans les objets précieux imaginés par Klaus Dupont qui ne renie pas l’héritage surréaliste. Chez Malabar, on le revendique. La marque portugaise se nourrit d’influences artistiques pour ses collections. « Des pièces comme le fauteuil Gala, le fauteuil Galatea et le tabouret Madonna s'inspirent de ce mouvement et du célèbre tableau « Galatea des sphères » de Salvador Dalí, qui reflète la fascination de Dalí pour la période atomique », précise Leandra Silva, sa directrice marketing.
Le trouble, le décalage, la poésie, l’onirisme ne nourrissent pas seulement une créativité renouvelée et débridée que Sur/Reality va mettre en lumière. Ils devraient ranimer notre curiosité et nous redonner le goût du risque, du rêve et de l’inattendu.